Livres recommandés par Eva Sadoun
Brutalisme Achille Mbembe
Alors que tout pousse vers une unification sans précédent de la planète, le vieux monde des corps et des distances, de la matière et des étendues, des espaces et des frontières, persiste en se métamorphosant. Avec le devenir-artificiel de l'humanité et son pendant, le devenir-humain des machines, une sorte d'épreuve existentielle est donc engagée. L'être ne s'éprouve plus désormais qu'en tant qu'assemblage indissociablement humain et non humain. La transformation de la force en dernier mot de la vérité de l'être signe l'entrée dans le dernier âge de l'homme, celui de l'être fabricable dans un monde fabriqué. À cet âge, Achille Mbembe donne ici le nom de brutalisme, le grand fardeau de fer de notre époque, le poids des matières brutes.
La transformation de l'humanité en matière et énergie est le projet ultime du brutalisme. En détaillant la monumentalité et le gigantisme d'un tel projet, cet essai plaide en faveur d'une refondation de la communauté des humains en solidarité avec l'ensemble du vivant, qui n'adviendra cependant qu'à condition de réparer ce qui a été brisé.
Eva Sadoun : C'est une vraie critique du néolibéralisme, assez intéressante, assez poussée, et ce qui est particulièrement intéressant, c'est ce que lui il appelle le devenir négre de la société occidentale. Donc c'est l'idée que, avec la crise climatique, des pays occidentaux sont en train d'expérimenter l'esclavagisation qu'ils ont fait vivre, et sont esclavagisés, eux, de différentes manières en fait. Et je trouve que c'est une perspective intéressante, et il appelle aussi, justement, à regarder les modèles aussi de développement, d'agroécologie etc. Parce que d'une certaine manière, c'est la même chose qu'avec la question du féminisme : quand on a été oppressés, victimes, on a développé des savoirs uniques en préservation, des instants de survie. Et du coup on a beaucoup à apprendre, d'où l'intérêt encore de la coopération. Mais en tout cas c'est un bouquin philosophique qui résume très bien les choses.
Recommandé par : Eva Sadoun
Episode : Eva Sadoun : Marchés financiers sans éthique : quels sont les risques ? - Thinkerview
Qui nourrit réellement l'humanité ? Vandana Shiva
À rebours des modèles de rentabilité et de mécanisation de l’agriculture moderne se trouve un principe fondamental : on ne peut nourrir l’humanité sans prendre soin de la terre.
Dans la continuité des traditions anciennes en harmonie avec la nature, Vandana Shiva rétablit la “loi de la réciprocité” selon laquelle tous les êtres vivants doivent prendre autant qu’ils donnent. Cette théorie écologique de l’agriculture, mue par la compassion entre les vivants, s’intéresse en premier lieu à la terre et aux petits producteurs qui, malgré la taille modeste de leurs parcelles, fournissent 70 % de nos aliments.
L’agroécologie paysanne est la clé : en revitalisant l’économie de la nature, elle produit de la nourriture de meilleure qualité, en abondance, et bénéfique pour la santé et le bien-être des communautés.
C’est là notre seul espoir pour réparer les ravages causés par l’activité humaine sur le vivant.
Recommandé par : Eva Sadoun
Episode : Eva Sadoun : Marchés financiers sans éthique : quels sont les risques ? - Thinkerview
Nous, fils d'Eichmann Gunther Anders
Les deux lettres ouvertes de Günther Anders adressées au fils d’Adolf Eichmann constituent un petit traité, avec mode d’emploi, sur la condition humaine aujourd’hui, considérée sous l’angle d’une catastrophe à répétition, qui entraîne l’obsolescence toujours croissante de l’humain lui-même. L’homme apparaît ici, de nouveau, comme le détenteur d’une capacité de production infiniment supérieure à sa capacité de représentation, et tout aussi bien à sa capacité de sentir. Dans ce contexte, l’idée même de responsabilité se trouve profondément atteinte ou profondément pervertie, de sorte que nous sommes tous, d’une manière ou d’une autre, des enfants d’Eichmann. Plus exactement, nous sommes tous devant un choix comparable à celui auquel Günther Anders confronte le destinataire de ses deux lettres : le choix de la continuité ou de la rupture. Un choix d’autant plus urgent que se réduit de jour en jour la marge de jeu dont dispose l’humain dans le monde tel qu’il devient.
Eva Sadoun : Il a une lecture encore plus violente de la société que Hannah Arendt sur la question du totalitarisme, il a une lecture, voilà, vraiment très très très dure. Ça fait un choc fort, même si je ne trouve pas que ce soit exactement ce que l'on est en train de vivre. Ce qui est certain, c'est que ça fait un choc et ça fait réaliser qu'on n'est pas juste des atomes, qu'on a une responsabilité.
Recommandé par : Eva Sadoun (et aussi par )
Episode : Eva Sadoun : Marchés financiers sans éthique : quels sont les risques ? - Thinkerview
Nous, fils d'Eichmann Gunther Anders
Les deux lettres ouvertes de Günther Anders adressées au fils d’Adolf Eichmann constituent un petit traité, avec mode d’emploi, sur la condition humaine aujourd’hui, considérée sous l’angle d’une catastrophe à répétition, qui entraîne l’obsolescence toujours croissante de l’humain lui-même. L’homme apparaît ici, de nouveau, comme le détenteur d’une capacité de production infiniment supérieure à sa capacité de représentation, et tout aussi bien à sa capacité de sentir. Dans ce contexte, l’idée même de responsabilité se trouve profondément atteinte ou profondément pervertie, de sorte que nous sommes tous, d’une manière ou d’une autre, des enfants d’Eichmann. Plus exactement, nous sommes tous devant un choix comparable à celui auquel Günther Anders confronte le destinataire de ses deux lettres : le choix de la continuité ou de la rupture. Un choix d’autant plus urgent que se réduit de jour en jour la marge de jeu dont dispose l’humain dans le monde tel qu’il devient.
Eva Sadoun : Il a une lecture encore plus violente de la société que Hannah Arendt sur la question du totalitarisme, il a une lecture, voilà, vraiment très très très dure. Ça fait un choc fort, même si je ne trouve pas que ce soit exactement ce que l'on est en train de vivre. Ce qui est certain, c'est que ça fait un choc et ça fait réaliser qu'on n'est pas juste des atomes, qu'on a une responsabilité.
Recommandé par : Eva Sadoun (et aussi par )
Femmes, race et classe Angela Davis
La mobilisation et l'engagement des femmes pour l'abolition de l'esclavage, la fin de la ségrégation ou les droits civiques - et la part qu'y ont prise les femmes noires - ont été déterminants. Au coeur de cette histoire transparaissent des contradictions encore à l'oeuvre aujourd'hui. Du XIXe siècle à nos jours aux Etats-Unis, Angela Davis décortique les intérêts conflictuels et convergents des grands mouvements de libération et d'émancipation. Elle montre comment le patriarcat, le racisme et le capitalisme ont divisé des causes qui auraient pu être communes. Preuve que c'est en surmontant les clivages de genre, de race, de classe, et en brisant les fausses mythologies que les femmes pourront le mieux se libérer des oppressions.
Recommandé par : Eva Sadoun