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Immigration : le grand déni François Heran

Par un étrange paradoxe, ceux qui s’imaginent que la France ferait face à un « tsunami » migratoire, par la faute des politiques, de l’Union européenne ou des juges, sont également convaincus que la migration est une anomalie dont la France pourrait se passer. On grossit l’immigration pour mieux la dénier. Pour dissiper ces illusions, il faut en revenir aux faits. Oui, la population immigrée a progressé en France depuis l’an 2000, mais moins que dans le reste de l’Europe. Non, notre pays n’a pas pris sa part dans l’accueil des réfugiés. La hausse vient d’abord de la migration estudiantine et économique, tandis que la migration familiale a reculé. En exposant les enjeux de la loi Darmanin de 2023, en rappelant combien la frontière est mince entre séjour régulier et séjour irrégulier, ce livre propose une approche résolument nouvelle de la question migratoire.

Professeur au Collège de France sur la chaire « Migrations et sociétés », François Héran anime l’Institut Convergences Migrations. Il a notamment publié Avec l’immigration (La Découverte, 2017), Lettre aux professeurs sur la liberté d’expression(La Découverte, 2021) et codirigé la 4e édition de Controlling immigration. A comparative perspective (Stanford, 2022).

Guillaume Pitron : Le livre de François Heran, qui est un professeur au collège de France, qui s'appelle Immigration : Le Grand déni. Alors là, tu te dis, "OK, j'invite un frontiste sur mon plateau, pas du tout." En fait, quand on dit Immigration le grand déni, on pense évidemment que… ce sont des expressions d'extrême droite pour dire "vous niez l'importance d'immigration." En fait, Immigration le grand déni de François Heran, c'est l'inverse. Je vois que certains l'ont lu. En fait, ça veut dire "vous niez, vous ne voyez pas, on ne voit pas" les réels chiffres de l'immigration. Et donc, en fait, ce livre rentre, en fait, dans toute la nuance de la complexité du phénomène migratoire à l'échelle mondiale, à l'échelle européenne, à l'échelle française, pour complètement nous dé-hystériser, c'est en fait que le mot existe autour de ces sujets-là, on en a bien besoin par les temps qui courent, et pour nous montrer que la France n'est pas du tout le principal pays d'accueil européen, qu'il y a toute une complexité d'appréciation de ces phénomènes migratoires et de transites, et c'est hyper intéressant. Parce que, par exemple, ce qu'on ne dit pas, c'est que plus de la moitié de l'immigration en France sont les étudiants, venus, notamment d'Afrique, de notre zone d'influence postcoloniale, mais qui viennent étudier en France et qui repartent à la fin de leurs séjours. On parle souvent de ceux qui rentrent, on parle pas de ceux qui sortent, on n'oublie de faire le sol au passage. Donc ça, c'est un livre qui est passionnant et qui permet de remettre de la raison, de la nuance dans ces phénomènes migratoires, qui permet d'expliquer quand même que si la France a gardé une influence dans les pays qui ont été parmi ces colonies, et c'est pas mal de garder des liens avec le Mali, le Burkina-Faso, l'Algérie, mais il faut que ces échanges qui se fassent, il faut qu'il y ait des politiques de visa. Qu'est-ce qu'on va faire ? On va s'enfermer ? Et puis, en fait, on va laisser les Russes gagner en influence au sud de nos frontières. Donc, ça pose des questions qui sont fascinantes, ça les remet en perspective, ça les nuance.

Ce livre est recommandé par : Guillaume Pitron

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